Journée Internationale des Droits des Femmes – interview de Pauline Rovillain

À l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes célébrée le 8 mars, Pauline Rovillain, Maître de conférences à Sorbonne-Université et chercheuse à l’Institut des nanosciences de Paris depuis 2014, nous partage son parcours, ses projets inspirants, et sa vision autour de la place de la femme dans le monde scientifique, durant une interview

Son parcours scolaire et professionnel :

Pourquoi le domaine de la physique et de la spintronique ?

Pauline a choisi la physique et la spintronique en raison de son aisance dans cette matière pendant ses années lycéennes. Initialement hésitante à se tourner vers l’optique, elle a changé d’avis après un stage portant sur l’optique et les études des matériaux magnétiques et électriques, une expérience qui l’a enthousiasmée. Son conseil est simple : ne pas rester sur des préjugés et explorer différentes opportunités peuvent conduire à des découvertes inattendues et passionnantes.

Le choix de se spécialiser dans la spintronique découle d’un stage en Master 2 portant sur les matériaux multiferroïques. Ces matériaux particuliers présentent la propriété unique de coupler le magnétisme et la ferroélectricité, permettant ainsi de contrôler l’aimantation par le biais d’un champ magnétique, un aspect fondamental de la spintronique. Ce qui l’a particulièrement fascinée, c’est la perspective d’aller au-delà des limites actuelles, puisque dans la recherche fondamentale, subsiste toujours cette question cruciale quant à son fonctionnement dans le futur. Ce sentiment d’exploration et d’ouverture vers l’inconnu dans le domaine de la spintronique l’a motivée professionnellement.

La parité est un sujet très important pour Pauline. Toutefois, sa réussite est perçue comme résultant d’une forme de discrimination positive en tant que femme. Bien qu’elle n’ait jamais ressenti de discrimination, elle admet que cela soulève parfois des interrogations sur son mérite personnel. Elle attache donc une importance significative à la Médaille de Bronze du CNRS, obtenue en février 2024, considérant cette distinction comme une reconnaissance authentique de ses réalisations.  

Elle pointe également du doigt le problème de parité dès le plus jeune âge, notant le faible nombre de filles s’orientant vers les sciences dans les classes de lycées. Elle relie cette inégalité à des influences socio-démographiques, illustrant par l’exemple des préférences académiques de sa fille. Elle insiste sur l’importance d’une sensibilisation dans toutes les matières (scientifiques, littéraires) dès le plus jeune âge, soulignant la nécessité d’un changement culturel.

Devenir mère est un acte courageux, surtout lorsque cela coïncide avec le lancement d’un projet et qu’une femme tente de retarder son congé de maternité pour éviter de se sentir exclue à son retour. Au cours de ses échanges avec d’autres femmes, elle a constaté que certaines ont rencontré des obstacles dans leurs recherches. Elle propose donc de sensibiliser cette réalité, soulignant que tomber enceinte est une étape normale de la vie et qu’il est tout à fait acceptable de ne pas être disponible à plein temps, car prendre soin de ses enfants est une responsabilité essentielle.

Ses initiatives majeures dans la recherche :

Il y a en premier lieu le résultat de sa thèse. Celle-ci met en avant la démonstration réussie de la manipulation permettant le couplage de l’aimantation avec des champs électriques externes, aboutissant à une publication de qualité. Ce projet a exigé des efforts considérables dans la réalisation d’expériences complexes, où elle a adopté une approche méthodique en procédant par petites étapes, mais avec une grande qualité dans les résultats obtenus.

Mais aussi, l’obtention de la Médaille de Bronze du CNRS. Ce succès découle de son initiative conjointe avec ses collègues, revisitant des idées issues d’une thèse préexistante. Ils ont réalisé des mesures de propriétés de résonances d’une grande précision, explorant le couplage unique entre l’acoustique et l’aimantation du fer sous un angle spécifique. Cette avancée a conduit à la rédaction d’un projet ANR (Agence Nationale de la Recherche), et leur participation à un projet européen.

Les mots de la fin :

La question de la place des femmes dans le monde scientifique demeure au cœur de défis persistants et d’évolutions nécessaires. Les témoignages, tels que celui de Pauline, mettent en lumière la complexité de la situation tout en soulignant les avancées réalisées. La reconnaissance des réussites des femmes scientifiques, illustrée par des distinctions telles que la Médaille de Bronze du CNRS (attribuée pour récompenser les premiers travaux prometteurs des chercheuses et chercheurs dans leur domaine), constitue un pas vers une véritable parité. En définitive, la promotion d’un environnement inclusif, combinée à des politiques soutenant les femmes dans la recherche, contribuera à forger un avenir où la diversité et l’égalité prévalent dans le monde scientifique.


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