L’acquisition d’un diffractomètre X de surface au laboratoire SPEC
En décembre 2023, le laboratoire SPEC du CEA Saclay a acquis un diffractomètre X de surface reconditionné, un appareil de démonstration fourni par le fabricant RIGAKU. Ce nouvel instrument permettra de mesurer les rugosités des interfaces et des surfaces, ainsi que la qualité cristalline des couches minces fabriquées par épitaxie, que ce soit par jets moléculaires ou par laser pulsé, et ce pour des systèmes pertinents dans le domaine de la spintronique. Depuis le 15 mars 2024, cet instrument est pleinement opérationnel
Le diffractomètre X de surface
Un accord commercial a été trouvé avec la société Rigaku pour un SmartLab XE avec une anode tournante au Cuivre de 9 kW. C’est à ce jour, la géométrie la plus complète (en laboratoire) et l’anode (L’anode est l’électrode où se produit l’oxydation dans un dispositif électrique ou électrochimique) la plus puissante disponible commercialement pour un diffractomètre de ce type. De plus, le diffractomètre est équipé d’un détecteur 2D Hypix, d’un monochromateur Ge(220)x2 et de divers éléments optiques permettant de conditionner le faisceau ou de moduler la résolution dans l’espace réciproque. Cet instrument sera très utile pour le Projet Transverse SPINMAT.
Quels en sont les objectifs ?
Les dispositifs qui reposent sur l’électronique de spin s’appuient très largement sur des couches minces (en dessous de quelques dizaines de nanomètres). Quand l’ensemble des atomes s’arrange dans un réseau parfaitement bien défini et ordonné on parlera de couches monocristallines. Ces arrangements particuliers peuvent donner lieu à des anisotropies 1exploitables dans le transport des courants de spin mais permettent aussi d’exploiter les contraintes que peuvent exercer les couches entre elles pour des épaisseurs suffisamment petites.
L’intensité diffractée des rayons X par un échantillon dépend de la densité et de la quantité de matière. Pour des couches minces il faut donc s’attendre à une chute de plusieurs ordres de grandeurs en intensité (6 ordres de grandeur pour une surface par rapport à un échantillon volumique). Cette chute d’intensité peut se compenser par une source fournissant un nombre plus élevé de photons et une géométrie d’incidence rasante2, mieux adaptée à ce type d’objets d’étude. Cependant, cela requiert un goniomètre plus complexe présentant au moins 5 cercles, ce qui est le cas du SmartLab.
Son fonctionnement
Le diffractomètre acquis permet une large gamme de mesures adaptées à des échantillons en poudres, texturés, poly-cristallins ou monocristallins. Nous nous intéressons plus particulièrement au dernier type et les mesures possibles sont (voir figure suivante) :
> la réflectivité qui permet la détermination des épaisseurs et rugosités de surfaces et d’interfaces
> les mesures spéculaires donnant accès aux distances caractéristiques entre les plans parallèles à la surface (bleu sur la figure)
> des mesures en incidence rasante qui permettent de sonder des distances entre plans perpendiculaires à la surface (en rouge). L’indice de réfraction des rayons est légèrement inférieur à 1. La réfraction de ces photons sur une surface va donner lieu à une onde évanescente pour des angles très rasants (<0.5°). Dans ces conditions la pénétration du faisceau dans l’échantillon se trouve limitée et le signal d’une surface ou d’une couche mince sera exaltée. On pourra alors avoir accès à l’ordre cristallin de plan perpendiculaires à la surface.
> des cartographies autour de pics de diffraction obliques contenant une information combinée dans le plan et hors du plan (en vert). Toute combinaison intermédiaire entre « dans le plan » et « hors du plan » est possible de manière à sonder n’importe quelle famille de plans oblique.
Les résultats attendus
Cet outil va permettre de quantifier les épaisseurs, les rugosités d’interfaces et de surface ainsi que la qualité cristalline des couches minces réalisées par épitaxie par jets moléculaires ou soit, par laser pulsé pour des systèmes d’intérêt pour la spintronique. Par exemple, pour des couches minces (jusqu’à 3-4 nm d’épaisseur) on pourra déterminer les contraintes d’épitaxie pour les exploiter dans une ingénierie des contraintes permettant de moduler la réponse des systèmes à des sollicitations extérieurs (champ magnétique, électriques…).
- Des variations dans les propriétés d’un matériau en fonction de la direction dans laquelle elles sont mesurées ↩︎
- En résumé, la géométrie d’incidence rasante est une technique où les ondes arrivent presque parallèlement à la surface étudiée, ce qui permet d’examiner en détail les propriétés de cette surface. ↩︎